04/03/2008

Auprès de mon arbre



La première réunion au sein de la Primavera s'est organisée dans la maison de Felix.
Il est peut-être bienvenu ici de préciser que lorsque l'on dit "maison", on ne se réfère en rien à cette antre composée de quatre murs et d'un toit mais bien plus simplement à l'espace ombragé du terrain de notre hôte. La vie de la maisonnée, les activités quotidiennes et élémentaires, se déroulent sous ces arbres qui nous cèdent leur ombre salvatrice. Au cours de la journée, les tables, chaises et fauteuils se déplacent au rythme de l'inclination du soleil. Chercher l'ombre la meilleure, tel est l'adage estival...
La maison de Felix se trouve à l'extrême sud de la communauté, perdue au milieu de la forêt. On y arrive par un petit chemin de terre, on y découvre une clairière fleurie et accueillante, on rassemble les chaises, en rond, on tend l'oreille... c'est plus bruyant qu'en pleine ville: singes crieurs, chevaux en liberté, oiseaux multiples et un foisonnement d'insectes se disputent notre espace auditif!

Fermons cette parenthèse contextuelle pour dresser un bilan de la réunion et, par la même occasion, le portrait de Felix.
Felix est ce que l'on pourrait appeler un leader communautaire. Voilà dix ans qu'il s'est engagé, seul, dans une lutte "territoriale" qui oppose la communauté au Parc National Pilcomayo. Une partie du territoire qui avait été restitué aux tobas au début du siècle est aujourd'hui occupée par le Parc National (la Laguna Blanca, "réserve" d'aliments vitaux pour les tobas, est l'objet principal du litige). C'est par son engagement sur le long terme dans cette cause, qui commence à porter ses fruits aujourd'hui, que Felix a gagné la reconnaissance et la confiance de ses pairs. Aujourd'hui, il est appuyé par un groupe d'une cinquantaine de personnes qui se réunissent chaque samedi pour faire avancer la question.
Lorsque nous étions encore à Nam Qöm, Felix a mené un travail d'information et de sensibilisation auprès de sa communauté tel que nous l'avions convenu au cours de la première semaine de la mission.
Résultat: c'est un groupe d'une trentaine de personnes parfaitement informées sur les objectifs et les enjeux du projet Tonolek que je trouve cet après-midi là.
L'accueil du projet est très positif. Plusieurs des participants soulignent avec ferveur que, pour la première fois, existe l'opportunité pour eux de participer à un projet devant bénéficier à leur communauté. Pour la première fois la décision et la responsabilité est leur et non celle d'intermédiaires lointains. Ils veulent saisir cette occasion, s'investir dans ce projet et se faire responsables de la confiance qui leur est donnée.
La réunion prend une tonalité plus joviale, presque euphorique quand surgissent des propositions d'activités à partager avec les touristes. Au fur à mesure que je précise les conditions du séjours des français (logement chez l'habitant, repas partagés etc) et que j'insiste sur les motivations des visiteurs (découvrir leurs habitudes, leur(s) histoire, savoirs, traditions...), les yeux s'illuminent d'enthousiasme, les propositions fusent autant que les rires...

Ils ne savent pas ce que c'est le terere? Vraiment ils vont vouloir manger du ñandou??? Et d'imaginer leurs visiteurs se déguiser en arbre pour aller chasser le ñandou...fou rire général!